Le syndrome du tunnel carpien (ou syndrome du canal carpien) est causé par une compression causant une irritation du nerf médian. Ce nerf important fournit à la fois sensibilité et force pour la main. Il traverse, tout comme les tendons qui nous permettent de fléchir les doigts, un petit tunnel dont les bordures sont les os du poignet ainsi qu’un ligament horizontal (le ligament transverse du carpe).
Il s’agit de la neuropathie d’enclavement la plus commune, comptant pour plus de 90% des cas de cette famille de blessure musculosquelettique. C’est une condition répandue : dans les pays industrialisés, cette condition touche autour de 50 personnes pour chaque tranche de 1000 individus. Nous connaissons pratiquement tous quelqu’un qui a déjà eu un syndrome du tunnel carpien.
Comment le syndrome se développe-t-il ?
L’étiologie du syndrome du tunnel carpien est rarement liée à une seule cause. La majorité du temps, il s’agit d’un problème multifactoriel découlant de plusieurs éléments juxtaposés.
Dans l’historique du/de la patient(e), il y a souvent un élément de compression répétées sur le nerf médian par un appui direct et prolongé du poignet sur une surface dure.
C’est une condition qui touche fréquemment les travailleurs et travailleuses de bureau. Les symptômes découlant de cette compression peuvent mettre plusieurs semaines, voire des mois avant de se manifester. Les compressions prolongées contribuent à augmenter la pression au niveau du poignet, ce qui réduit le débit de la circulation veineuse, encourage l’œdème local et compromet la circulation sanguine acheminé directement au nerf médian. À plus long terme, ce dernier se sensibilise et peut même développer des lésions physiologiques. Les tissus environnants, dont les tendons des fléchisseurs des doigts, peuvent également s’enflammer, ce qui réduit leur fonction normale de support et de protection et contribue à sensibiliser le nerf davantage.
Les vibrations et les mouvements répétitifs du poignet peuvent également contribuer au problème. On sait par exemple que les travailleurs et travailleuses de la construction peuvent aussi développer cette problématique.
Il y a également des facteurs plus systémiques :
• La génétique
• Le fait de présenter un surpoids ou d'être obèse
• Être enceinte ou en ménopause (ces transitions hormonales importantes influencent temporairement la rétention des fluides)
• Présenter une maladie inflammatoire auto-immune comme l’arthrite rhumatoïde ou la goutte.
Le syndrome peut être objectivé par plusieurs tests. Le plus fiable semble être d’appliqué une compression directe sur le tunnel carpien pendant 30 secondes afin de vérifier si cela reproduit les symptômes du/de la patient(e).
Signes et symptômes
Pour ce syndrome, il est important d’agir rapidement. En effet, il se révèle toujours plus facile à prendre en charge lorsque les symptômes n’ont pas trop progressé dans le temps. Ainsi, si vous vous reconnaissez devant les signes et symptômes de cette condition, commencez dès maintenant à faire les modifications nécessaires.
• Sensation d’engourdissement et diminution de la sensibilité de la peau, principalement au niveau du pouce, de l’index et du majeur.
• Douleur sur ces mêmes zones de la peau
• Parfois irradiations vers le poignet, l’avant-bras ou le bras
• Secouer vigoureusement la main soulage généralement les symptômes (Flick sign).
Au départ, les symptômes sont habituellement présents durant la nuit et s’estompent durant la journée.
Lorsque la condition progresse, les inconforts peuvent devenir diurnes et se manifester aussi lors d’activité répétitive ou qui demande une motricité fine de la main tels que dessiner, taper au clavier ou jouer aux jeux vidéo. Dans certains cas plus sévères, les symptômes deviennent présents en permanence. Certains symptômes plus désagréables, généralement associé à une progression du syndrome sont les suivants :
• Faiblesses de la main
• Perte de la motricité fine
• Maladresse
• Atrophie (perte de masse musculaire) de la musculature du pouce
Prise en charge
La première étape consiste à identifier les facteurs de stress mécanique sur le nerf médian et de les modifier dès que possible. Pour cela, faire affaire avec un(e) ergothérapeute en milieu de travail peut être avantageux. Il faudra :
• Permettre le repos des mouvements répétitifs du poignet ou, au minimum, réduire le temps d’exposition à ces mouvements
• Ajuster l’ergonomie du poste de travail pour minimiser les compressions.
• Pour les travailleurs et travailleuses de l’informatique, un coussinet de gel sous le poignet est un accessoire fort utile.
• La souris ergonomique (maintenant très abordable) offre l’avantage d’une position neutre. Même si cela prend un jour ou deux à s’y habituer, c’est un changement très salutaire à moyen et long terme. Cette souris ne génère aucune pression sur le tunnel carpien tout en diminuant le travail des muscles extenseurs du poignet (ce qui peut être lié au problème d’épicondylite du coude).
Idéalement, il faudra aussi s’intéresser aux facteurs systémiques, en encourageant l’activité physique aérobique par exemple (20 minutes de marche au minimum tous les jours) ainsi qu’une saine alimentation plus faible en calorie pour favoriser la perte de poids, s’il y a lieu.
Une orthèse convenablement ajustée qui sera portée durant la nuit permettra de réduire les mouvements contraignants du poignet pendant le sommeil et ainsi d’atténuer les engourdissements nocturnes.
Les médicaments de types glucocorticoïdes, oraux ou sous forme d’injection, peuvent également être utilisé dans certains cas. Demandez conseil à votre médecin ou pharmacien(ne).
La thérapie manuelle et les exercices sont-ils efficaces pour ce syndrome ?
En un mot : oui!
Une recherche publiée en août 2020 s’est intéressées aux effets à long terme des exercices et de la thérapie manuelle sur une population de femmes ayant souffert du syndrome du tunnel carpien et ne présentant pas d'autres comorbidités. Ainsi, après une période 4 ans, les femmes ayant opté pour des sessions de thérapie manuelle (seulement 3) qui incluait des manœuvres de désensibilisation du système nerveux et réalisant des exercices à la maison ont obtenu d’aussi bons résultats que ceux ayant optés pour une chirurgie. C’est-à-dire, il n’y avait pas différence significative entre les deux groupes sur les niveaux de douleurs rapportées et sur la capacité fonctionnelle de leurs mains. Pas plus que sur l’incidence d’avoir recours à une chirurgie (une deuxième pour ceux qui avait déjà priorisée cette option).
La thérapie manuelle incluant des mouvements de désensibilisation nerveuse est virtuellement sans risque et semble donc avoir une place de choix dans la prise-en-charge de ce syndrome. De plus, il est possible de réaliser plusieurs exercices de désensibilisation nerveuse à la maison.
Exercice neurodynamique pour le nerf médian
Voici un exemple d’exercice bénéfique pour le syndrome du tunnel carpien. Rapellez-vous que, pendant l’exécution, l’exercice ne devrait jamais créer de symptômes douloureux ou désagréables. N’hésitez pas à prendre rendez-vous avec un professionnel du domaine musculosquelettique pour obtenir de plus amples informations ou trouvez une autre version de ce type d'exercice qui conviendra à votre situation.
1. Pour votre poignet droit : placez votre main gauche sur votre épaule droite afin d’éviter d’hausser l’épaule droite durant l'exercice.
2. Placer le bras doit à hauteur d’épaule, paume tournée vers le plafond.
3. Diriger doucement votre poignet et vos doigts vers le plancher (extension du poignet et des doigts). Vous devriez ressentir une sensation d’étirement dans la main , le poignet et/ou l’avant-bras droit. Éviter un mouvement trop ample ou trop rapide. La manœuvre doit être agréable.
4. Rapprocher l’oreille droite de l’épaule droite. Ceci atténuera la sensation d’étirement. Maintenez la position 2 secondes.
5. Diriger ensuite le poignet et les doigts vers le plafond tout en inclinant la tête vers l’épaule gauche. Maintenir la position 2 secondes.
6. Répéter les étapes 4 et 5 pour un total de 10 à 15 répétitions. Prenez une petite pause d’une trentaine de secondes et réaliser une deuxième série.
Réaliser cet exercice, ou un autre mouvement semblable, deux fois par jour.
Intervention chirurgicale
La procédure devrait être réservé seulement aux cas où l’examen de conduction nerveuse par un neurologue montre une dégénération axonale significative, lorsque les méthodes de thérapie manuelle, d’exercices et la médication n’ont pas permis de produire d’améliorations de la situation sur une période de quelques mois.
L’intervention consiste en la section du ligament transverse du carpe afin de libérer de l’espace pour le nerf médian. Cette opération de chirurgie mineure peut être réalisée par endoscopie ou non. La période de récupération post-chirurgie prends en général de 3 à 4 mois, (retour au travail généralement possible après 6 à 8 semaines) et il s’écoule parfois 1 an avant que la force de la main ne revienne complètement .
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Nicolas Blanchette pratique l’ostéopathie et la kinésiologie avec son équipe Ostéo-Solution sur la Couronne Nord de Montréal, au Québec. Vous pouvez prendre rendez-vous pour une consultation en cliquant ICI. Vous pratiquez la thérapie manuelle ? Vous voulez en savoir davantage au sujet des dernières recherches et des exercices ? Découvrez nos formations continues pour ostéopathes, physiothérapeutes, kinésithérapeutes, etc.
Sources
Fernandez-de-las-Penas et coll. Physical Therapy, Août 2020
Sevy et coll, StatPearls, NCBI Bookshelf, Janvier 2020.
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