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Photo du rédacteurNicolas Blanchette, Ost, B.sc kin

Votre dos est bien plus solide que vous ne le pensez



Saviez-vous qu’une toute autre pandémie coexistait en même temps que celle que nous vivons depuis déjà plus d’un an ? Cette menace sournoise était même présente depuis plus longtemps que le coronavirus et nous menions nos vies sans trop nous en préoccuper. Pourtant, elle affectait déjà et continue d’affecter directement la vie d’environ… tenez-vous bien…2,41 milliards d’individus sur la planète!

Le célèbre journal médical britannique The Lancet nomme ce phénomène alarmant la pandémie de la douleur[1]. En effet, en 2020, c’est 1 personne sur 3 à l’échelle mondiale qui endure une forme de douleur dans sa vie quotidienne. Par rapport à leur précédent recensement, ces données représentent une augmentation de 63% des cas sur une période de 30 ans!

Le mal de dos : champion toute catégorie

Parmi les différentes causes de douleur étudiée par The Lancet, le mal de dos remporte la palme dans 160 pays parmi les 204 analysés dans la recherche. C’est le champion toute catégorie des causes d’invalidité! Selon le National Institute of Neurological Disorders and Stroke (NINDS) : ‘’En 1990, le mal de dos était recensé comme sixième cause d’invalidité aux États-Unis. En 2010, il a grimpé de trois échelons, laissant uniquement les maladies cardio-vasculaires et pulmonaires le devancer’’.

Chez nos voisins du sud, comme à l’échelle mondiale, force est de constater que le mal de dos gagne du terrain. Pourtant, la colonne vertébrale de l’espèce humaine, à ce que l’on sache, est toujours identique à ce qu’elle était il y a 30 ou 50 ans. Qu’est-ce qui permettrait alors d’expliquer cet accroissement des cas d’invalidités ? Malgré l’accès à des soins de santé de toujours plus grande qualité, pourquoi la douleur continue-t-elle à étendre son emprise dans les dernières décennies ?


Le principal coupable

Avant tout, il faut reconnaître que la douleur est un phénomène complexe et que les causes de celle-ci impliquent toujours de nombreux facteurs ayant des répercussions variées. Même si la douleur est vécue de manière universelle par tous les êtres humains, chaque expérience douloureuse à son propre caractère très unique. Cependant, plusieurs experts s’entendent pour dire qu’une des causes principales de cette augmentation est un autre élément qui a augmenté lui-aussi à vitesse grand V dans les dernières décennies. Et cet élément c’est… la sédentarisation de nos sociétés.

En effet, les statistiques mondiales nous renseignent que l’être humain bouge de moins en moins. Le nombre de personne obèse par exemple, a triplé dans les 40 dernières années à l’échelle planétaire. En 2016, près de 40% des adultes de plus de 18 ans était en surpoids[2]. Au Canada, par exemple, 75% des canadien(ne)s n’atteignent pas les cibles minimales de l’Organisme Mondial de la Santé en matière d’activité physiques, soit environ 20 minutes de marche rapide par jour (Le Devoir, 2019). Et les statistiques sont très pessimistes pour la jeune génération, qui poursuit le processus de sédentarisation. Cette croissance dans l’adoption d’un mode de vie sédentaire n’est pas simple à décoder puisqu’elle découle de nombreux facteurs autant technologiques que socio-culturels.


Les fausses croyances

L’un des (nombreux) freins à être plus actif physiquement sont des fausses croyances qui ont malheureusement été véhiculé pendant plusieurs années à propos de notre dos et de nos articulations en général et qui sont encore largement rependues.

Selon le Dr. James Rainville, professeur de médecine et de réhabilitation du département médical de l’Université Harvard : ‘’ La communauté médicale a trop longtemps mis l’emphase sur la prudence et le repos lors d’épisode de maux de dos. Cette approche relativement récente dans les recommandations était pourtant tout à l’inverse de ce qui avait été enseigné des décennies auparavant [traduction libre][3]’’


Par ailleurs, selon les recherches scientifiques récentes en matière de douleur chronique et de psychologie, la transition de la douleur aigue vers la douleur persistante (chronique) est connue comme étant catalysée par plusieurs processus psychologiques comprenant les attentes, les attitudes, les comportements et les croyances envers la douleur (Linton 2011). Autrement dit, si nous adoptons des croyances invalides sur la douleur, ces dernières peuvent nous influencer négativement et nous faire développer des attitudes et des comportements (évitement, peur, anxiété) qui ne feront que renforcer le cercle vicieux de la douleur persistante.

Encore plus clairement : si vous êtes convaincus que votre dos est fragile… il pourrait bien le devenir!

Après tout, la douleur est une alarme automatique qui vise notre propre protection (Butler, 2013). Qui plus est, on sait depuis longtemps que les patients qui guérissent le mieux de trouble musculosquelettique sont ceux qui se gardent actifs physiquement peu de temps après un épisode problématique (Rainville, 2018). Ce n’est pas pour rien que l’exercice physique est la modalité la plus étudiée et dont on dispose des meilleures preuves pour contrer la douleur d’origine musculosquelettique (Babatunde, 2017).


Déconstruire les croyances dépassées à l’aide des données modernes

Pendant trop longtemps, des croyances pessimistes et trop protectionnistes sur notre dos ont contribué à entretenir la douleur que nous développions. Heureusement, les mentalités sont lentement en train de changer. De plus en plus d’études sont publiés chaque année pour révéler la solidité de notre colonne vertébrale et comment celle-ci dispose des éléments nécessaires pour récupérer, même de graves traumatismes. L’exercice physique est un catalyseur de la santé vertébrale. Examinons certaines recherches.

La question de l’usure du dos

Une croyance répandue est que nos disques intervertébraux s’useraient plus rapidement plus ils seraient sollicités. C’est-à-dire, plus on fait d’exercice physique, plus on soulève des objets lourds, et plus les disques se détérioreraient rapidement. Selon les preuves de la littérature disponibles actuellement, cela ne semble pas tout à fait exact! Une recherche a même examiné la colonne vertébrale de près de 14 000 jumeaux pour tenter d’isoler les facteurs les plus lié à l’usure discale. Les scientifiques sont arrivés à la conclusion suivante :

‘’La croyance populaire qui présuppose que la dégénération des disques intervertébraux est principalement liée à l’âge et au niveau d’activité physique n’est pas supporté scientifiquement par notre étude’’ (Battié et coll., 2009)

Tiens donc! Voilà qui est très intéressant. D’ailleurs, deux recherches récentes ont aussi montré un effet positif de l’exercice physique sur la santé des disques intervertébraux. Par exemple, les gens pratiquant la course à pieds présentaient une hypertrophie des disques intervertébraux de la colonne vertébrale en comparaison avec les sujets sédentaires (Belavy et coll, 2017). Pour simplifier, les disques de leur colonne vertébrale était plus robustes que chez les gens moins actif physiquement! Dans une autre recherche (Bowden et coll. 2016), une relation positive a été démontré entre la santé des disques intervertébraux vus sur une résonnance magnétique et un niveau plus élevé d’activité physique hebdomadaire.


Pas une machine… un écosystème dynamique qui s’adapte

Des résultats similaires sont obtenus pour d’autres articulations quand on considère la relation exercice / santé articulaire. C’est aussi le cas pour les genoux (Shellock, 1991) et pour les épaules (Keener, 2017). Davantage d’exercice n’amène pas plus de détérioration ou de douleur.

Contrairement au parallèle que l’on entend souvent, notre dos (et le corps humain tout entier, tant qu’à y être) n’est pas comparable à une machine qui s’userait au fil du temps. En réalité, notre organisme est dynamique et en constante adaptation. Nous sommes, en outre, parfaitement outillé pour faire face aux différents stress mécaniques que nous imposons à notre corps par nos mouvements. Toute forme d’exercice physique est un stress! Mais rappelez-vous que le stress n’est pas nécessairement quelque chose de mauvais. En effet, c’est en récupérant de ce stress graduel et progressif que l’organisme devient une version plus solide, plus forte, plus endurante de lui-même! ‘’Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort’’ disait Nietzsche. Cela semble aussi vrai pour notre colonne vertébrale que pour l’ensemble de nos articulations.

Vers une reconceptualisation plus saine de notre dos

Si nous souhaitons collectivement diminuer l’ampleur de la ‘’pandémie de la douleur’’, il faut cesser de concevoir notre colonne vertébrale comme quelque chose de fragile qui s’use lorsqu’on l’utilise. Les preuves scientifiques modernes nous montrent que, au contraire, notre dos est extrêmement résistant : il s'adapte. L’exercice physique lui est particulièrement bénéfique. Dans beaucoup de cas, avoir mal au dos ne signifie pas qu’il y ait forcément un dommage physique. Une fois les deux ou trois premiers jours d’une crise de mal de dos passées, l’exercice physique est bénéfique pour gérer la douleur et prévenir les récidives dans la grande majorité des situations. Si vous avez besoin d’aide pour votre mal de dos qui traîne, consultez un professionnel peut vous aider à vous guider vers un mode de vie plus actif. C’est le premier pas le plus important, mais le changement commence avant tout dans votre tête!

 

Nicolas Blanchette pratique l’ostéopathie et la kinésiologie avec son équipe Ostéo-Solution sur la Couronne Nord de Montréal, au Québec. Vous pouvez prendre rendez-vous directement sur son site web au www.osteo-solution.com

Sources :

Cieza et coll. Global estimates of the need for rehabilitation based on the Global Burden of Disease study 2019: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2019, The Lancet, décembre 2020.

Harvard Health Publishing, Babying your back may delay healing, https://www.health.harvard.edu/pain/babying-your-back-may-delay-healing, Octobre 2018,

Linton et coll. Impact of psychological factors in the experience of pain, Physical Therapy, Volume 91, 2011. The Better Clinician Project, https://www.betterclinicianproject.com/blog/10-evidence-based-reasons-you-and-your-patients-should-exercise, (2020)

[1] Cieza et coll. Global estimates of the need for rehabilitation based on the Global Burden of Disease study 2019: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2019, (décembre 2020) [2] World Health Organization, https://www.who.int/news-room/fact-sheets/detail/obesity-and-overweight#:~:text=Facts%20about%20overweight%20and%20obesity&text=In%202016%2C%2039%25%20of%20adults,tripled%20between%201975%20and%202016. [3] Harvard Health Publishing, Babying your back may delay healing, https://www.health.harvard.edu/pain/babying-your-back-may-delay-healing, Octobre 2018

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